La République aux républicains, 1870-1878.
Dès avant la guerre de 1870 et la chute du Second Empire, se développent à Sète des courants révolutionnaires et anarchisants. La proclamation de la République et l'administration de Noël Guignon ne permirent pas à ceux-ci de s'exprimer. Il fallut un combat long et difficile contre les forces conservatrices pour que le nouveau régime trouve son assise.
Le plébiscite de 1870 destiné à approuver l'évolution de Second Empire l'avait été dans le département, mais à Sète, le "oui" n'avait recueillique 1565 voix contre 4000 "non". Important, le courant républicain comporte une aile gauche particulièrement active. André Bastelica, un des leaders marseillais de l'Association internationale des Travailleurs a créé à Sète des sociétés clandestines d'ouvriers tonneliers aux convictions affirmées. Arborant parfois l'églantine rouge, ils sont accusés "d'entretenir une grande agitation au sein de la population". Et le 19 juillet 1870 quand est déclarée la guerre avec la Prusse, les Républicains les plus avancés de Sète font connaître leur désaccord, en particulier le 2 juillet lors d'un concert sur le canal (Histoire de Sète, Privat 1985). Après les défaites et la captivité de l'Empereur, la République est proclamée à Paris le 4 septembre 1870. A Sète, le 5, les manifestants installent une commission municipale à l'Hôtel de ville avec, comme maire, Noël Guignon, un tailleur de pierres radical. Sous son égide, la ville participe à l'effort de guerre. Elle adhère à la Ligue du Midi, fédération régionaliste et révolutionnaire, animée d'un esprit de guerre à outrance. Elle sera dissoute comme entreprise séparatiste en octobre 1870.
La proclamation de la Commune de Paris, le 18 mars 1871, est accueillie avec enthousiasme. Mais ce soutien ne débouche que sur une tentative de conciliation entre Paris et Versailles. Guignon, malgré des ré-élections triomphales, doit céder aux pressions conservatrices. Et à Paris, l'Assemblée, soucieuse de faire durer un "ordre moral" préparant une restauration, confie le pouvoir exécutif pour 7 ans au maréchal de Mac-Mahon. Cela a le mérite de gagner du temps au moment où échoue la conciliation entre les prétendants au trône et où le descendant des Bourbons refuse le drapeau tricolore. La République est admise depuis 1875 (amendement Wallon), les lois constitutionnelles organisent les pouvoirs publics, mais la "République des ducs" reste lourde d'ambiguïtés.
Face aux tenants de "l'ordre moral", assimilé à l'ordre social, les républicains remportent des élections partielles dont certaines ont un écho national. La crise va éclater après les élections de 1876 quand, à propos du pouvoir temporel des papes, Mac-Mahon retire sa confiance à Jules Simon, et forme le gouvernement De Broglie. Il faut procéder, après cette crise dite du 16 mai, à de nouvelles élections. Les républicains reviennent plus nombreux, malgré des pressions gouvernementales.
Et la République s'implante dans le pays. C'est tout l'Hérault qui vote républicain. Et c'est un républicain – Jules Grévy – qui remplace Mac-Mahon à la présidence de la République, le 30 janvier 1879. Après près de 6 ans de luttes (1872-1878), la République était aux mains des républicains.
Hervé Le Blanche