De la fin des années 1870 à 1914, le développement de Sète est incontestable. La communauté humaine sétoise prend un caractère urbain affirmé, c'est à dire marqué par l'industrie, le commerce et les services. De grands travaux améliorent le port, de nouveaux quartiers surgissent, l'immigration fait croître la population.
Et les activités se diversifient.
De la fin des années 1870 (1875-1879) à la veille du premier conflit mondial, le trafic du port a pratiquement doublé, passant de 1 080 158 tonneaux (1875-1879) à 2 354 499 (1895-1899) (L. Dermigny, Esquisse de l'histoire d'un port). Cette expansion du trafic maritime nécessite de grands travaux pour le porte de 1882 à 1889. A l'est comme à l'ouest, le brise-lames est prolongé et dans la rade, on port le tirant d'eau à 8 mètres. Le système de canaux est complété : le canal latéral, prolongement du bassin du Midi, unit le canal de Sète à l'étang de Thau. Et le canal de Sète (aménagé sous Louis XIV) est relié au canal maritime par la darse de La Peyrade, sur la rive de laquelle s'élèvera le Palais consulaire en 1882. La Chambre de commerce étend son influence sur Frontignan et Mèze, ainsi que vers Balaruc et Bouzigues. Par contre, Marseillan et Agde sont dans l'orbite de Béziers et dépendent de sa Chambre de commerce. Ils ne sont même par reliés à Sète par voie terrestre.
Conséquence logique de l'activité économique, la population s'accroît. Elle augmente de 15 % entre 1876 et 1911 où elle atteint 33 049 habitants. Mais l'essor n'est pas uniforme, la population stagne après l'application des tarifs protectionnistes de 1892, puis entre 1906 et 1911 lors de le crise viticole languedocienne. L'expansion démographique est portée par l'immigration. Car, si l'on naît beaucoup à Sète, on meurt aussi beaucoup (J. Sagnes, Histoire de Sète, Privat 1987). Conséquence de la saleté de la ville qu'expose le Guide Joanne , les épidémies sévissent (choléra en 1884, typhoïde en 1898), la mortalité infantile est forte et les Italiens apportent avec eux les saints protecteurs, Saint Cosme et Damien. Et puis, s'il n'y a pas la crise et son lot de suicides, on peut être victime d'accident du travail ou se noyer dans le canal.
En 1881, près de la moitié des habitants ne sont pas nés à Sète. Sont ensuite venus s'y établir des habitants d'autres communes de l'Hérault, puis d'autres départements (Lozériens, Aveyronnais et autres Aquitains). Les années 1880 voient arriver des Italiens du Mezzogiorno, des Espagnols. Les Italiens forment la majorité des patrons-pêcheurs et matelots qui pratiquent la pêche en mer en 1898. La même année, 209 patrons de barque et 28 matelots, d'origine française surtout, pêchent dans l'étang de Thau. Les Espagnols sont fréquents dans les métiers du bâtiment. La part des étrangers passe de 4,10 % en 1885 à 10,7 % en 1896.
Selon un dicton en vogue dans les années cinquante, "il y a de tout monde à Sète". Le romancier Valéry Larbaud en 1908 y avait même vu des enseignes en russe lors de son passage en 1908. Et si la ville joue parfois à la métropole (tramway, théâtre), en fait, la communauté montrera dans ses votes qu'elle est à dominante ouvrière.