D'après le rapport de J.M. Grangent de 1786, avec le poisson salé, "l'article des vins et eaux de vie" est l'autre principale branche du commerce du port de Sette. Favorisée par le climat et les conditions économiques, la production de vin fournit un article d'exportation qui n'est pas sans défauts et le notable de Sette propose des solutions pour améliorer la production et développer le trafic.
Selon le mémoire de Jean Mathieu Grangent, les productions du diocèse d'Agde sont variées, mais "le terrein y étant particulièrement complanté en vignes, sa récolte la plus importante est celle du vin"… A Sette même, sur un sol non arrosé mais fertile, à côté de quelques fourrages et légumes, d'un peu de blé et d'huile, on produit "douze cent muids (268 litres) de vin année commune...[dont]quelques muids de vin blanc et de vin muscat dont la qualité vaut celle du vin muscat de Frontignan"… En Languedoc, favorisé par le climat, on s'est avisé que la production de vin est source de richesse. Comme l'explique le voyageur anglais Arthur Young, le cultivateur obtient une bonne récolte au mieux tous les trois ans.
Avec la vigne, on a, tous les ans, l'équivalent d'une bonne récolte. Et, produit recherché quand il est bon, le vin peut amener la fortune : les vins blancs picardans de "Marseillan et lieux circonvoisins" ont permis à des propriétaires de réaliser en un an la valeur de leurs fonds. On a planté en vignes tous les domaines proches de la mer, alimentant l'activité des "négocians faisant à Sette le commerce de la commission des vins et esprits" (eau de vie).
Selon A. Degage (Histoire de Sète, 1987), le commerce des vins à Sette prend son essor de 1730 à 1750. Et puis, nous indique J.M. Grangent, en 1770, le vin a manqué dans les autres provinces du royaume. L'on s'est tourné vers les vins du Languedoc qui ont accès à des régions où ils étaient inconnus. Et Sette, favorisée par l'exemption du droit à l'exportation, devient le débouché de tout le Bas Languedoc, de Narbonne à Nîmes. On exporte le muscat de Frontignan, Mireval, Lunel et Béziers, bien sûr les vins de Marseillan, ainsi que du Montpelliérais (Saint Christol, Saint Georges d'Orques) et même Saint Gilles.
A cela s'ajoutent les productions du Roussillon, des Côtes du Rhône, d'Alicante, de Malaga, voire du Portugal et de Madère. Seuls, les Gênois s'intéressent aux vins courants, à condition qu'ils soient bon marché. Il est vrai qu'ils s'aigrissent vite et sont incapables de "soutenir la mer". La vinification est faite sans trop de soin : raisin non égrappé, parfois pourri, mélange des lies,des produits du marc, celliers insuffisamment frais… Ce manque de soin, déplore Grangent, fait que nombre de vins ne sont pas jugés bons, mais, dans d'autres conditions, pourraient trouver leur place dans le commerce.
Car toutes ces causes freinent les exportations, favorisent la concurrence et gênent le développement du port dont nous parlerons par ailleurs.
Hervé Le Blanche